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Par Christaldesaintmarc le 11 Octobre 2023 à 06:00
Le film "Territoires d’Amour et d’Art" de Marie Halopeau Le Corfec a été présenté au cinéma Vox de Laignes devant une très nombreuse assistance : les amis peintres, mais aussi les admirateurs des deux artistes que sont Maryvonne et Jean-Pierre Garrault étaient là, impatients de visionner cinq ans d'expression artistique des deux artistes.
Marie Halopeau Le Corfec a présenté en quelques mots le but de son travail :
« Depuis soixante ans, les artistes Maryvonne Jeanne-Garrault et Jean-Pierre Garrault composent chacun une œuvre personnelle côte à côte.
Depuis vingt ans, je les connais, je les regarde.
Depuis cinq ans, je les filme.
Et je m’attache particulièrement à leurs créations picturales qui se nourrissent de deux territoires d’inspirations : la Bourgogne et la Bretagne.
A les regarder peindre, l’un sans l’autre, dans l’intimité de leur atelier respectif, je m’interroge sur ce que signifie « être un couple d’artistes ».
Et quelles sont les résonnances entre leurs œuvres ?
Au gré de ma caméra, je saisis dans le secret de leurs toiles, quelques fantômes de l’Histoire bourguignonne et les mirages d’une mémoire bretonne estompée.
Maryvonne et Jean-Pierre, témoins créateurs, donnent à voir, à découvrir, à ressentir, à s’émouvoir, à se souvenir.
Ils composent à mes yeux une œuvre.
Peu à peu, au fil du récit, je comprends finalement le pourquoi de ce film rythmé par la musique de nos voix, le mouvement de leurs pinceaux et la complicité de nos regards croisés. »
Dans son film plein de tendresse et de sensibilité, "Territoires d'Amour et d'Art", Marie Halopeau a suivi le travail de deux artistes châtillonnais que nous aimons : Maryvonne et Jean-Pierre Garrault habitants de Massoult petit village où ils se sont fixés depuis plus de quarante ans.
Tous deux travaillent dans deux ateliers séparés.
Jean-Pierre peut peindre sous le regard de tiers, qu'il oublie tant son génie créateur le transporte dans son univers intime...
Maryvonne est plus secrète, elle ne supporte pas que des yeux extérieurs regardent l'ébauche de ses peintures, tant elle les modifie à la craie de couleur, à l'aquarelle, à l'huile, en utilisant toutes les techniques possibles.
Tous deux aiment la Bourgogne et ses paysages, en particulier la forêt du Mont-Beuvray qui recèle des arbres extraordinaires et merveilleux aux structures étranges.
Jean-Pierre a une tendresse particulière pour ces arbres qu'on nomme des "queules".
Ces queules sont les rescapés de la soumission que leur ont imposés les hommes lorsqu'ils étaient jeunes souples et malléables pour en faire des "pléchies".
Quand, la haie abandonnée, ces arbres martyrisés ont repris leur liberté, ils ont poussé de façon étrange et mystérieuse...
Jean-Pierre les a découverts lorsqu'il avait quinze ans, en compagnie de son père, peintre lui aussi et amoureux des arbres, père dont il garde un souvenir filial très fort.
Mais le couple Garrault s'évade aussi très souvent en Bretagne si chère au cœur de Maryvonne qui y retrouve ses souvenirs d'enfance près de sa chère grand-mère.
Lors d'un voyage au pays de son enfance, Maryvonne a déniché un album de photographies anciennes représentant des femmes, des enfants, mais aussi des fêtes, des fest noz.
Elle se sert de ces modèles pour ressusciter sur ses toiles tous les aspects de l'ancienne vie bretonne si chère à son cœur.
En Bretagne, il y a aussi la mer, les dolmens dont tous deux s'inspirent, et le château du Taureau dans la baie de Morlaix, où ils aiment se rendre en bateau.
Marie Haloppeau a su saisir avec une grande sensibilité et subtilité les paysages bretons, ses images sont aussi des tableaux naturels superbes...
Elle a ajouté à son film de la musique très bien choisie, chacun des deux peintres ayant un thème particulier qui colle parfaitement à leur personnalité
Quelquefois Maryvonne et Jean-Pierre Garrault exposent ensemble comme ici en Bretagne.
Il ne leur est alors pas facile de conjuguer leurs façons de peindre tout à fait différentes, mais le résultat est superbe et émouvant ...car ils forment un couple si uni dans la vie que le visiteur le ressent.
A Châtillon sur Seine ils ont aussi exposé ensemble à la Galerie d'Art et d'Or.
Le film de Marie Halopeau a été beaucoup applaudi pour sa beauté et pour cette façon de présenter de manière intimiste le travail artistique de Maryvonne et Jean-Pierre Garrault.
Ces deux derniers, ainsi que la réalisatrice, ont répondu aux nombreuses questions des auditeurs avec beaucoup de fraîcheur et de gaieté...
Quelques liens d'articles que j'ai consacrés à Maryvonne et Jean-Pierre Garrault.
Leur exposition commune à la galerie d'Art et d'Or en 2019 :
L'exposition, chez eux, à Massoult, du travail que tous deux ont consacré à une histoire familiale très émouvante de Maryvonne, intitulée "Requiem" :
L'exposition des peintures de Maryvonne, organisée lors du Salon des Amis du Châtillonnais en
Une présentation par Maryvonne de son album "Partition bretonne" à la bibliothèque de Châtillon sur Seine :
Les projection en plein air de travaux artistiques à l'ordinateur de Jean Pierre et de Maryvonne lors de la Nuit des Musées en 2016 :
Et (cela sort un peu du cadre !) j'ai un souvenir très agréable du restaurant "le Bourg à Mont" que tenait si merveilleusement leur fille Julie....La salle de restaurant était embellie par les peintures de ses parents, le plaisir était donc gustatif, olfactif et visuel, la totale !!
Les Garrault, une famille qu'on ne pourra jamais oublier !
2 commentaires -
Par Christaldesaintmarc le 20 Décembre 2019 à 06:00
LES GARRAULT, UN DOUBLE UNIVERS
Pénétrer dans l’univers d’un artiste, c’est s’expatrier, oublier ce que l’on est, ce que l’on sait, devenir poreux pour accueillir un univers autre pénétrer dans le double univers d’un couple d’artistes relève d’un défi digne d’une acrobatie intellectuelle et spirituelle.
Maryvonne et Jean-Pierre Garrault vivent côte à côte, chacun fixé sur son idéal artistique, fasciné par cet inconnu à naître, et cependant unis l’un à l’autre par un côtoiement qui est une fusion, et que nourrit un jeu savant d’échos, rendus d’autant plus évidents qu’un artiste est un être humain passionné par ce qu’il porte en lui, et largement ouvert à l’autre. Ainsi avons-nous deux singularités qui s’animent et se vivifient mutuellement.
En apparence, nous nous trouvons face à deux univers fort distincts. En réalité nous découvrons des correspondances qui se méritent.
Maryvonne ne peut cacher son ascendance bretonne. Elle porte son pays autant que son pays la porte, jusque dans son prénom. Limpide, glissant, aérien, lumineux « Maryvonne » est un prénom d’embruns reluisants, aux accents de pèlerinages et de patiences, aux silhouettes de femmes de marins dont saint Yves est le protecteur.
Sa Bretagne est historique, intime et hors du temps. Elle relève du folklore, à condition de rendre à ce terme ses lettres de noblesse, son poids d’histoire et de savoir populaire Le folklore est la science du peuple. Parce qu’elle peint non tant ce qu’elle voit mais ce qu’elle porte en elle, ce qu’elle est., Maryvonne est reliée à une histoire, à un âge qui n’a rien à voir avec nos calendriers prosaïques . Avec ses silhouettes de Bretonnes, son art de peindre en jouant de couleurs hâtives, pressées d’aller à l’essentiel, suggérant ce qui n’appartient pas à une mode,
Maryvonne quitte même l’histoire pour naviguer dans la légende. Le mot « légende » signifie ce qui doit être lu, dit, raconté, sauvegardé. Le vrai temps qui fascine Maryvonne est le « Il –était-une-fois’ des contes d’enfance. Lesquels ont leur part d’ombres, de mystères, de tempêtes, de violences, au milieu de naïvetés apparentes et parfois trompeuses.
Quand elle mémorise des femmes costumées, quand elle saisit sur le vif les empoignades des lutteurs bretons, dans cette lutte appelé « gouren »...
et quand elle détaille des objets qu’on appelle sottement en français des « natures mortes » (préférons le terme anglais « still life », vie silencieuses), Maryvonne est voyagée par les mêmes besoins de fidélité, de témoignage, de lien viscéral avec ce qui la concerne et la relie à ce qui la dépasse.
Un des secrets de Maryvonne est qu’elle n’a pas été élaguée par le temps qui crée des adultes insensibles et raisonnables. C’est l’enfant qui peint, c’est l’enfant qui aime les greniers secrets de la mémoire, même quand les ombres lui font peur et ravivent d’anciens souvenirs douloureux. Une paire de sabots dans un panier d’osier où git un tourteau peut devenir dans l’imagination de l’enfant une tête de mort.
Et la poupée qui nous regarde en sait plus long que nous sur les mystères qui trament l’essentiel de toute vie. C’est la petite sœur délaissée du Chaperon Rouge. Un artiste est souvent un enfant nourri de douleurs, obligé de se créer un jour de substitut, à ses propres clartés de paradis perdu.
Sachons voir ce que peint Maryvonne à larges traits colorés qui refusent l’anecdotique et le frivole. Ses femmes, ce sont souvent des « revenantes », des rescapées du sablier des vents du large. Ses rochers sont des ombres fantomatiques voire inquiétantes. Parfois on n’est pas loin de l’abstraction comme si le visible allait s’évaporer. Chaque coup de pinceau sait qu’il est temps d’agir, contre vents et marées.
Voilà pourquoi sa peinture a quelque chose de nostalgique et d’éolien
Il y a un terme en marine qui me paraît convenir parfaitement aux toiles de Maryvonne Garrault, c’est celui d’ « œuvres vives », cette partie immergée qui permet au navire de tracer son chemin dans la mer. S’il est question de granit en Bretagne, on doit parler de « tendre granit » pour cette sensibilité toujours aux aguets.
Je disais tout à l’heure que l’univers de Jean-Pierre Garrault paraissait fort différent des paysages bretons de son épouse. Regardons-y de plus près.
Le monde de Jean-Pierre est essentiellement minéral, à l’image de ces fortifications ruinées qui occupent tout le fond de la salle d’exposition.
Le minéral, ce que son prénom, Jean-Pierre semble promettre déjà. Mais s’il y a quelque chose qui me paraît symboliser la vision de ce peintre, c’est une figure magique et mystérieuses, celle de la Loba. Née d’une légende, sans doute d’origine mexicaine, cette femme autrement appelée « la Huesera » (la femme aux os) ou « la Trapera » (la ramasseuse) est en quête des ossements d’animaux, essentiellement de loups, que sa dextérité reconstitue intégralement. Alors elle se met à chanter, et l’animal reprend sa vie d’avant sa mort et s’en va librement.
N’y a-t-il pas le même miracle chez ce peintre lorsqu’il se penche sur des plantes torturées, sur des amas de pierres ruinées par le temps, sur des dolmens bretons, sur des tours mystérieuses de Sardaigne ? Il les regarde, il les ausculte, il se les incorpore, il fait partie, corps et âme, de ces témoignages de la vie passée ou présente, il les oriente, il les anime d’un feu secret, il leur sauve la vie, les mettant hors du temps. Mieux, il les ressuscite par l’alchimie de son art. Comme son épouse, Jean-Pierre vit intensément ce qu’il regarde et recrée,, rejetant les anecdotes, les détails superflus. Son abstraction, visible dans les végétaux stylisés, n’est plus qu’un élan vital, aux couleurs d’une sève sacro-sainte . Cela est beau, parce que c’est la vie originelle, sauvée des pesanteurs reliée au ciel et à la terre par des éclairs qui sont des visions fulgurantes.
Ses arbres qu’on croit morts, ce sont des queules, des formes tourmentées avec lesquelles Jean-Pierre entre en sympathie. Il les purifie, comme s’il s’agissait d’ossements précieux. Il les veut vivants, en tous les sens. Ce sont des squelettes dont on se demande s’ils sont encore végétaux. Telle est la force du regard de Jean-Pierre Garrault que les règnes se confondent et s’harmonisent, en dépassant leurs limites. Toujours l’esprit circule dans la matière ainsi régénérée. Cet esprit, c’est autant la sève de l’arbre que la vision artistique du peintre qui se confondent sur la toile.
Et l’abstraction, loin de créer je ne sais quelle confusion, est capable de transformer le hasard des formes en révélations magistrales.
Quant aux squelettes, si fréquents chez ce peintre, son but est loin de nous peiner. Rien de funèbre, rien de morbide. Une célébration constante afin de déceler la beauté des formes et la victoire de l’essentiel sui ne périra pas.
Regardez cette tête de cervidé, peut-être un mégacéros du paléolithique, qu’importe ! Jean-Pierre ne s’arrête pas à l’histoire. Ce qui compte, c’est le travail du temps, son pouvoir de métamorphose, sa puissance continuelle. Ce que le temps met en beauté et que l’artiste saisit au vol d’un regard intuitif. C’est une révélation votive
Ce bois palmé de cervidé devient une main tendue par-delà la mort. On entre en sympathie avec tant de beauté qui nous regarde encore de ses yeux vifs.
Venons-en aux pierres, toujours monumentales. Quand il peint un dolmen, nous ne sommes pas seulement en Bretagne. Nous sommes dans la légende rituelle qui perdure dans le silence d’un matériau que des croyances ont « chargé » de pouvoirs secrets. Ses dolmens sont des « bouches d’ombre ». elles savent des choses, entretiennent les légendes bretonnes, pourquoi pas celle de l’Ankou qui rôde et cherche à nuire. Parfois on n’est pas loin des relents infernaux, des puissances souterraines, chthoniennes.
Dernier thème abordé qui prolonge le précédent, les nuraghes. Des pierres édifiées par l’homme, pour constituer des tours rondes, tronconniques, du XVIIIème siècle au XVème siècle avant Jésus-Christ. Des œuvres monumentales, creuses, contenant souvent un escalier intérieur menant à une terrasse. Des observatoires, sans doute liées à l’astronomie ou à l’astrologie, du temps paléolithique où la science et la religion étaient jumelles. Une étymologie douteuse fait venir ce mot « nuraghe » de l’arabe « nûr » qui signifie « feu, lumière ». Ce sont des monument hiératiques, des pierres sacrées, des reliquaires d’une mémoire inassouvie. Comme à Stonehenge. On est dans le chthonien, dans le volcanique dans la puissance formidable, que Jean-Pierre a relevée à sa façon, avec des éléments tirés du sol, du feu, de la lumière. Cette peinture est un cérémonial.
On est dans le sacré païen, épique, pas loin de la création d’un monde dont nous avons hérité. Cette préhistoire légendaire est la version virile des rochers de Maryvonne, des luttes celtiques, des noces de la terre et du feu, de l’ordre et du chaos, de la mémoire et de l’oubli.
Aujourd’hui, dans ce double musée intérieur et secret qui les unit et qui rassemble en eux les souvenirs et les symboles, si harmonieusement éclairés de pénombres, c’est cette vision qui vient révéler glorieusement les strates de la mémoire et les pulsions de la création artistique, instinctivement nourrie d’instincts nécessaires, colorée de réminiscences celtiques, sans doute, pas loin du légendaire, mais plus encore incarnation d’une liberté originale et sans concessions.
Chez Jean-Pierre, la légende est palpable, brutale, effervescente. Elle donne à la matière ses pleins pouvoirs. Il est à sa façon un archéologue de la beauté secrète, souvent nocturne.
Chez Maryvonne, ces apparences, on les dirait endimanchées, à la proue du grand large et de la nostalgie.
Chez Jean-Pierre c’est le temps qui compte et qui dure, chez Maryvonne c’est l’espace en liberté grande.
Mais dans les deux cas se dessine une épopée du légendaire, aérienne ou chtonienne, subtile ou agressive, alerte ou pétrifiée.
Un mémorial, une sacralisation où la vie et la mort se lèvent dans un même sillon créateur de beautés.
(Michel Lagrange novembre 2019)
L'exposition des œuvres de Maryvonne Jeanne-Garrault et de Jean-Pierre Garrault est à voir encore, jusqu'au 3 janvier 2020, à la Galerie d'Art et d'Or de Châtillon sur Seine.
Ne la manquez pas !
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Par Christaldesaintmarc le 31 Mai 2015 à 06:00
Lorsque Jenry Camus m’a proposé de rejoindre les peintres du Châtillonnais pour leur exposition annuelle, je me suis demandé avant d’accepter quels tableaux pourraient être exposés à cette occasion.
J’ai pensé alors au choix que j’avais fait au moment de la création du restaurant de Julie « Le Bourg à Mont » de réaliser quelques « tableaux de restaurant ». Ils avaient pour fonction d’intégrer les images les plus « conventionnelles » de Châtillon-sur-Seine, l’histoire de Julie, mon histoire donc, et la volonté de faire de ce lieu un espace d’échange, de plaisir, d’intimité, un clin d’oeil à la peinture des riches salles à manger bourgeoises. Le portrait de Julie inspiré par la belle chocolatière de Liotard et d’autres portraits complétaient l’ensemble. Certains de ces tableaux ont quitté le restaurant et le Châtillonnais. Encore l’an passé je découvrais à Vaison-la-Romaine l’un d’entre eux qui avait séduit une ancienne habitante venue déjeuner.
Julie est partie. Quelques uns de ces tableaux sont encore là. Il s’agissait alors pour moi de m’approprier la fameuse vue de Châtillon la traitant façon Claude Lorrain, en y intégrant d’autres éléments, cavaliers, petites bretonnes, bergers, garçonnets. Inversement au même moment je détournais des tableaux du Musée des Beaux Arts de Dijon en vues de Châtillon, avec l’église Saint Vorles et le Pont du Perthuis-au-Loup.Des natures mortes complétaient l’ensemble.
Je ne pouvais pas me limiter à ces « vieux tableaux » pour cet accrochage. Mes peintures des deux années passées sur les souvenirs de « Marguerite » ont été présentées l’an passé à l’atelier. Leur côté trop personnel et dramatique n’était pas de circonstance. J’ai donc simplement extrait de cette série des « poupées », les miennes ou celles trouvées chez Jacques Majeski, Antiquités St-Nicolas.
Toutes aussi liées à mon histoire. Elles rejoignent ainsi la série des « Greniers », le grenier Bourguignon étant très proche du grenier breton.
En complément l’atelier sera ouvert le 30 mai avec des « produits » bretons.
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Par Christaldesaintmarc le 11 Avril 2014 à 06:00
Maryvonne Jeanne-Garrault a laissé pour un temps sa mémoire bretonne pour fouiller encore plus profondément dans son passé , dans une histoire inconnue et enfouie que seule la curiosité, l’obstination et la volonté d’un frère a fait ressurgir.
Ce qu’il a découvert a profondément troublé leurs proches, et d’autres aussi qui ont été confrontés à cette même volonté d’étouffer dans une famille tout ce qui n’était pas «de bon ton»,
Marguerite Bazille réapparait alors que tout avait été fait pour qu’on oublie jusqu’à son existence. C’est l’histoire d’une enfant, d’une soeur, d’une épouse, d’une mère recluse pendant plus de trente ans morte de faim en 1942. Elle rêvait de théâtre: elle n’eut d’autre droit que celui d’être spoliée. C’est aussi l’histoire d’un homme ruiné, et d’enfants condamnés au silence.
Beaucoup de questions sont sans réponse. Daniel Jeanne et sa sœur Maryvonne n’ont travaillé, chacun dans leur domaine qu’avec des pièces que Marguerite a pu voir et toucher: écrits, photos, objets restés dans la famille ou confiés aux archives.En publiant «Placement volontaire», Daniel Jeanne a voulu rendre justice à cette femme. Occasion de mettre en lumière les épisodes peu connus de l’histoire de la première moitié du XXème siècle: traitement de la folie, enfermement des femmes, sort des aliénés pendant la guerre, famine dans les hopitaux psychiatriques.
«Beaucoup a été dit et écrit à propos de la folie et de l’enfermement d’une célèbre femme sculpteur, au début du vingtième siècle. On sait moins, on ne veut peut-être pas savoir, que beaucoup d’anonymes ont subi un sort comparable, semblablement enfermées derrière les hauts murs d’un asile parce que quelques hommes en avaient décidé ainsi. Inhumanité ordinaire d’une société dans laquelle le pouvoir des hommes sur leurs femmes permettait d’accomplir, en toute impunité, et en totale inconscience, des actes criminels.
Un jour de septembre 1910 un pharmacien normand tendit un piège à sa femme et la fit entrer au Bon Sauveur, célèbre hôpital psychiatrique de Caen. Elle avait vingt-cinq ans et voulait faire du théâtre. Elle fut séparée de ses enfants et condamnée à devenir folle. Elle mourut, trente-deux ans plus tard, dans un asile de l’est de la France. Elle s’appelait Marguerite Bazille.
Ce qui a été longtemps caché finit par disparaître. Les indices sont rares. Il restait quelques meurtrissures. Elles ont fait resurgir les fragments épars d’une vie oubliée.»REQUIEM.
Il n’y a pas de tombe pour Marguerite, pas de lieu de mémoire hors le cimetière de St Rémy. Avant le repos, il fallait cette exposition qui doit faire exister une femme que l’on aime à imaginer artiste, musicienne, comédienne.
Maryvonne Jeanne-Garrault a peint sa grand-mère telle qu'elle se l'imagine, de dos, une délicate voilette de tulle recouvrant ses cheveux...
Ou d'après son véritable portrait, vu plus haut, quelle beauté...
La poupée articulée présente dans les dessins et les tableaux était là depuis toujours, dans le bric à brac de l’atelier, nue, abimée, aveugle, échevelée. Elle a pris tout son sens après cette découverte.
SUREXPOSITION.
Environ 50 peintures et collages d’éléments «d’époque», mais aussi accrochage devant les tableaux de Jean-Pierre Garrault, non pas des fonds, mais des tableaux de la série «La loba»: encore une histoire de résurrection…
Dessins, pastels, images numériques complètent l’ensemble.
Les oeuvres interrogent sur l’identité, la famille, l’enfermement, le statut des femmes, la disparition, le secret, la création.Maryvonne JEANNE-GARRAULT
Exposition Atelier de Massoult: 4, 5, 6 avril et 11, 12, 13 avril 2014, 15h -19h
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Par Christaldesaintmarc le 30 Octobre 2011 à 06:30
Maryvonne Jeanne-Garrault a présenté son livre "Partition Bretonne " à la Bibliothèque Municipale de Châtillon sur Seine vendredi 28 octobre.
De très beaux tableaux étaient exposés dans les locaux de la Bibliothèque...
Des portrait de bretonnes, mais aussi d'enfants dont elle saisit les complicités, les rires, les danses, les joies.
Maryvonne Jeanne-Garrault, bien que bourguignonne depuis des décennies, a gardé au fond du coeur l'amour de sa Bretagne natale...Elle nous dit qu'elle arrive difficilement à peindre les paysages et les personnages de notre région, tellement son attachement à sa province natale est fort: bretonne elle est, bretonne elle restera !
Ses peintures représentent souvent des gens âgés, en particulier des grands-mères qui ressemblent à son aïeule Germaine.
Annick Gueneau a lu quelques passages du livre de Mona Ozouf "Composition française" , où nous sont présentées des grands-mères d'autrefois, si bonnes et si fortes..., nos grands-mères à tous et toutes, nous les avons reconnues avec émotion...
Françoise a fait de même avec des textes de Michel Le Bris.
Maryvonne a évoqué sa grand-mère Germaine qu'elle aimait tant, sa coiffe qu'elle changeait souvent (plus facile à laver que ses longs cheveux).
Germaine n'a pas été à l'école. Après la mort de son mari en 1916, elle dût quitter son village, étouffer sa culture, sa langue maternelle avec l'interdiction de la transmettre. Elle garda pourtant sa coiffe, symbole ou signal qu'elle
arborera fièrement toute sa vie.Résister, lutter, avancer.
Maryvonne nous donna aussi des indications sur les coloris qu'elle utilise: outremer, roses, verts, jaunes..., elle nous dit pourquoi les visages de ses personnages sont flous, alors qu'elle saurait merveilleusement bien les dessiner...
Il est magnifique le livre de Maryvonne, ses peintures où les visages sont seulement esquissés pour nous laisser le plaisir de les imaginer, sont accompagnées de très beaux textes de Gérard Gay-Barbier, Marie Halopeau, Henry Le Bal, Annick Le Corfec, Patricia Oranin et Claude Youenn Roussel.
L'artiste dédicaça ensuite ses ouvrages avec une bonne humeur communicative...
Le site de Maryvonne Jeanne-Garrault, vous y admirerez ses superbes bretonnes :
http://www.jeanne-garrault.com/
Jean-Pierre Garrault, lui aussi peintre de talent, était venu accompagner son épouse Maryvonne.
Tous deux résident à Nesle et Massoult.
Le site de Jean-Pierre Garrault :
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