Jean-Louis Chapet qui m'avait envoyé d'anciennes cartes postales de Châtillon sur Seine et un beau diaporama sur sa ville de Meaux, m'a offert un conte Morvandiau ,en patois ...
Le patois du Morvan ressemble un peu à celui du Châtillonnais,vous pourrez donc comprendre sans doute l'histoire..
Mais pour plus de facilité je mettrai la traduction en dessous de chaque paragraphe..
Mettre un texte aussi long sans illustrations aurait été un peu "indigeste", aussi j'entrecouperai ces paragraphes par de très originales cartes postales Morvandelles que m'a gentiment offertes Sylviane..
Ces cartes n'ont aucun rapport avec l'histoire ,mais elles sont si humoristiques qu'il aurait été dommage de ne pas les montrer !
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EIN TOR DE COUECHON
Vouéqui eine histouére qu’ot pas jeune pussqu’elle s’ot paissée aivant 1870.Lai république n’étot encoué pas éventée et a y évot ein roué qu’on aippelot l’empereur et qui s’aippelot Napoleyontrouais de son nom de famille mas que tot ein chaicun por d’iqui aippelot d’ein faubriquet qu’ment que c’étot lai môde.En causant de lu,a diint tortous tot le temps Baguinguet qu’ment qu’on dit le Jambion le Mautué le Valotin vou bin encoué le Frisé vou le Gueurnadier ,ai moins encoué des fois,que çai feusse son nom de baptême :ç’ot ce qu’i ne sait pas.
Dans ce temps-lai don,a restot vé Ailnié, le Didi de lai Cacane d’aiquand tote sai faimille :lai fonne,les p’tiots et son neurin.Ein dimouinge qu’al aivint été tortous ai lai messe,a rentrèrent chez eux aissez taird ,retairdés qu’al aivint été pou fére des tas de cômmissions.A venint de s’aicheurter ai l’entor de lai tab’e pou goûter,en mégeant eine ole de craipeais et des treuffes dans lai peaie , quanque tot d’ein coup al entendèrent rouâger au dessus de z-eux.A drossérent les éreilles ;le breut que d’ venot de pus en pus fort aivot l’air de se fére chu le gueurné :çai s’airr’tôt peu çai r’commençot ,çai rouâgeot,çai trimballot,çai forraillot,çai beurdoûlot !....
Un tour de cochon
Voici une histoire qui n’est pas jeune puisqu’elle s’est passée avant 1870.La république n’était pas encore crée et il y avait un roi qu’on appelait l’empereur et qui s’appelait Napoléon trois de son nom de famille mais que tout un chacun ici appelait d’un sobriquet comme c’était la mode.En parlant de lui,ils disaient tous tout le temps Baguinguet comme on dit le Jambion,le Mautué le Valotin ou encore le Frisé ou le Grenadier,à moins encore des fois,que ça fusse son nom de baptême :c’est ce que je ne sais pas.
Dans ce temps-là donc,il restait vers Ailnié,le Didi de la Cacane avec toute sa famille :la femme les enfants et le bétail.Un dimanche qu’ils étaient allés tous à la messe,ils rentrèrent chez eux assez tard,retardés qu’ils avaient été,pour faire des tas de commissions.Ils venaient de s’asseoir autour de la table pour goûter,en mangeant une aile de crapeau et des pommes de terre dans la peau,quand tout d’un coup,ils entendirent bouger au dessus d’eux.Ils écoutèrent;le bruit qui devenait de plus en plus fort avait l’air de se faire sur le grenier :ça s’arrêtait puis ça recommençait,ça bougeait,ça marchait,ça faisait un bruit de ferraille,ça remuait !...
Des moments çai se côyot ,des aut’es fois çai fiot ein beurlan du diabe…Le Didi,en se levant,tot effairfanté,dié : « mas quoué que ç’ot que çai ?Quoué que ç’ot,cent raiges,qu’a peut bin y aivouair chu not’gueurné ?.... »-« Hélâ mon dieu,que chouignot lai Cacane,qu’i sons don bin pardus !.... »Les grands quiaquint des dents,les p’tiots rébollint,tot le monde lampot de poue,paissqu’a faut bin vous dire que dans ce temps-lai on étot crouéyôle qu’ment tot :pairtout on viot des peutes bétes ,des r’venants,des ensorceilloux….Le Didi que s’étot drossé,diot et rediot tojors : « Mas quoué que çai peut-ti bin éte ?.... »et le beurlan se continuot de pus belle.
« On ne sait jemas ce que peut airriver,que se décidé ai dire le Didi,a nous faut aippeler les vouésins….Frére qu’a dié ai son pus grand gamin,cours viâ les sercher en lou-z-raicontant ce que se passe chez nos !.... »Le niallou ne voulot jemas sorti dihors.Ai lai fin,en viant qu’a fiot grand jor,aipré airvouair eurgairdé pou lai crouésie,a rouvré lai porte tot doucement peu,peurnant son ébeurdie,a courré viâ téni tot le pays ;ses sabots en quiairint chu le chemi !....
Des moments ça se taisait,des autres fois ça faisait un boucan du diable….Le Didi,en se levant,tout épouvanté,dit : « mais qu’est ce que c’est que ça ?Qu’est ce que c’est,cent rages,qui peut bien y avoir sur notre grenier ?... » « Hélas mon dieu,que pleurait la Cacane,que nous sommes donc bien perdus !.... »Les grands claquaient des dents,les gosses pleuraient,tout avait peur,parce qu’il faut bien vous dire que dans ce temps là on était croyant comme tout :partout on voyait des vilaines bêtes,des revenants,des ensorcelleurs….Le Didi qui s’était dressé ,disait et redisait toujours : « mais qu’est ce que ça peut bien être ?.... »et le boucan continuait de plus belle.
« On ne sait jamais ce qui peut arriver,que se décide à dire le Didi,il nous faut appeler les voisins….Fils qu’il dit à son plus grand gamin,court vite les chercher en leur racontant ce qui se passe chez nous !... »Le gosse ne voulait jamais sortir.A la fin,en voyant qu’il faisait grand jour,après avoir regardé par la fenêtre,il rouvre la porte tout doucement puis prenant son élan,il court vite tenir tout le pays ;ses sabots claquaient sur le chemin !...
Pchot-ai-pchot le monde se raimeulot,mas al étint tortous dévouérés de poue et v’nint en bandes,les eins d’aiquand des forches,les aut’es des coutres,les aut’es des faux.A faut que vous saivins que,dans ce temps-lai,nue n’aivot de fusils :a n’y évot ranque le père Gustin,ein vieux de 75 ans qu’aivot ein ch’tit fusil ai pierre que ne tapot pas pus fort qu’eine poterale et peu encoué pas ai tos les coups !....A s’aimouégnot étou lu,du pus pu viâ qu’a pouvot.
Lai mâyon feut bintôt pleine de monde,mas vous érins entendu vouler eine cancouerne,chu tellément qu’a ne fiint point de breut.A tenint lou jairgon tot bas peû al écoutint le rouâgement que se fiot là-haut et que los-z-y copot le vent.Chaicun beillot son aivis.La Cacane diot : « ç’ôt seurément quéque chouse de pas nâturel pusqu’aivant d’ailler ai lai messe,i yé fromé ai quié lai porte du gueurné en mouinme temps que lai çulle de lai mâyon… »Si c’ot qu’ment çai,que répondot le Ph’lippot,a yé de lai maigie lai-dedans. »En entendant çai,les hommes se souégnèrent,les fonnes chouéyèrent ai genoux et se mettèrent ai dédveuder des tas de peurrières pendiment que lai Cacane d’aiquand ein râmeau de bouis frandallot de l’eaie b’nite pairtout,mouinme jeusqu’au plincher. « çai serot bin étou des fois,vot’e vieux onque,défunt Pheulbert,que réquiamerot des peurières »que dié tot d’un coup lai Glâdie du Nicot du Tronsoué. « Portant,que répondé le Didi,vouéqui chix ans qu’al ot mort et i yons fait dire 18 messes,sans compter nos peurières qu’i fions tos les jors ai son étention….Tot çai,çai fait de lai coûtance :i ne pouvons portant pas non pus,nous foute ai pain-sercher !.... » « Bin entendu,que dié lai petiote du Touénot,mas i pouvons tojors bin dire tortos ensemb’e ein Nom-Du-Père,por lu :qu’ment qui sons trébin,al airé bin pus d’aution… »
Petit à petit les gens se rassemblaient mais ils étaient tous dévorés de peur et vinrent en bandes,les uns avec des fourches,les autres des coutres,les autres des faux.Il faut que vous sachiez que,dans ce temps là,personne n’avait de fusils :il n’y avait que le père Gustin,un vieux de 75 ans qui avait un petit fusil à pierre qui ne tapait pas plus fort qu’une pétoire et puis encore pas à tous les coups !....Il vint lui aussi,du plus vite qu’il pouvait.
La maison fut bientôt pleine de monde,mais vous auriez entendu voler une mouche,tellement qu’ils ne faisaient pas de bruit.Ils parlaient tout bas puis ils écoutaient le boucan qui se faisait là-haut et leur coupait le souffle.Chacun donnait son avis.La Cacane disait : « c’est sûrement quelque chose de pas naturel puisqu’avant d’aller à la messe,j’ai fermé à clé la porte du grenier en même temps que celle de la maison… »Si c’est comme ça que répondait le Philippot,il y a de la magie là- dedans. »En entendant ça,les hommes se signèrent,les femmes tombèrent à genoux et se mirent à débiter des tas de prières pendant que la Cacane avec un rameau de buis lançait de l’eau bénite partout,même jusqu’au plancher. « ça serait bien aussi des fois,votre veil oncle,feu Pheulbert,qui réclamerait des prières » que dit tout d’un coup la Gladie du Nicot du Tronsué. « Pourtant,que répond le Didi,voici six ans qu’il est mort et nous avons fait dire 18 messes,sans compter nos prières que nous faisons tous les jours à son intention… Tout ça,ça coûte :nous ne pouvons pas non plus nous ruiner !... » « Bien entendu,que dit la petite du Touénot,mais nous pouvons toujours bien dire tous ensemble,un Nom-Du-Père,pour lui,comme nous sommes beaucoup,il aura plus d’écoute… »
Et vouéqui que tortous a d’oûtant lous chapeais ou lous calottes ,peu qu’a bordonnant lai peuriére Voué,mas flûte !...çai n’empouâchot pas le frandallement de contunier ni moinme de d’veni de pus en pus fort.En viant çai,le Noëtot qu’ot pas chi couillon que çai,se redrossé et dié : « i sons en train de causer pou ne ran dire….Pou saivouair ce que ç’ot,a n’y é qu’un moyen…. »-« lequé,lequé ?... »qu’a diérent tortous… « Et bin,ç’ot d’y ailler vouâ !... »Voué mas ç’étot pus asié a dire qu’ai fére :nue ne voulé,et a diint au Noëtot : « mas chi te y aill’o toué ? »peu,qu’ment qu’a ne cimot pus,al y diint encoué : « i irins derré toué pou te souteni…essaye-don !. »Le Noëtot ai c’t’heure se viot bin embârraissé :al airot bin voulu t’ni sai langue,mas c’ment fére pou se dépiger ?...Ai force de sercher,a finiché pou dire : « diez don,qu’a dit i croués moué,qu’a faut que çai set quéque-z-ein qu’en impose,que monte chu le gueurné…Il croués que ç’ot au Maire vou bin au Monsieu le Curé que çai revint…A faut viâ aill’er les queri !... « Oh pardié voué, t’és râyon !... qu’a répondérent tortous. »Et bin i cours les sercher que dié le Noëtot,hureux de se sorti d’embârras et d’eurtirer son épingue du jeu.
Et voici que tous enlevant leurs chapeaux ou calottes,puis débitant la prière,mais flûte !...ça n’empêchait pas le lancement de continuer ni même de devenir de plus en plus fort.En voyant ça, le Noëtot qui n’est pas si idiot que ça se redresse et dit : « nous en train de parler pour ne rien dire….Pour savoir ce que c’est,il n’y a qu’un moyen… »-« lequel,lequel ?... »qu’ils dirent tous… « et bien c’est d’y aller voir !... »oui mais c’était plus facile à dire qu’à faire :personne ne veut,et ils dirent au Noëtot : « mais si tu y allais toi ? »Puis comme il se taisait,ils dirent encore : « nous irons derrière toi pour te soutenir…essaie donc !. »Le Noëtot à cette heure se voyait bien embarassé :il aurait bien voulu tenir sa langue,mais comment faire pour se tirer d’affaire ?...A force de chercher,il finit par dire : « dites donc,qu’il dit,je crois moi,qu’il faut que ce soit quelqu’un qui en impose,qui monte sur le grenier…Je crois que c’est au Maire ou bien à Monsieur le Curé que ça revient…Il faut vite aller les chercher !... « Oh pardi oui,t’as raison !...qu’ils répondirent tous. »Et bien je cours les chercher que dit le Noëtot,heureux de se sortir d’embarras et de tirer son épingle du jeu.
Ai lai Cure,laivous qu’al airrivé tot époursi,a ne troué pas le Monsieu le Curé qu’étot pairti vé ein poor mailaide que les queurneilles se disputint és cairtes,pou l’y graicher ses bottes .A recourré don viâ chez le Monsieu le Maire qu’étot brâmant tot sou,en train de se chauffer les gréves.A l’y raiconté l’aiffaire en y s’mondant que çai pressot,qu’ein mâlheur pouvot bin airriver.Le maire qu’étot ein vanterais de premiére,dié tot de suite que d’aiquand son échairpe a n’aivot poue de ran pusqu’al étot lai Commugne,et,que çai feusse le Bon Dieu vou le Diabe qu’a faudrot bin qu’on voyeusse !...Voué,mas eine fois dans lai mâyon du Didi ,quanque le Maire entendé de ses éreilles le beurlan que çai fiot tojors,a feut moins couraigou :a tâchot de de se détirer en y enviant les eins vou les aut’es d’abord…mas nue ne bougeot !...A feut don bin forcé d’y paisser.En viant qu’a ne pouvot pas fére autrement,a peurné le devant et tot le monde suivé .
A la Cure,où il arrive tout épouvanté,il ne trouve pas le curé qui était parti voir une pauvre malade que les corneilles se disputaient les cartes,pour lui graisser ses bottes.Il court donc vite chez le maire qui était bien tout seul,en train de se chauffer les jambes.Il lui raconte l’affaire en lui précisant que ça pressait,qu’un malheur pouvait bien arriver.Le maire qui était un vantard de première,dit tout de suite qu’avec son écharpe il n’avait peur de rien puisqu’il était la commune,et,que ça fusse le bon dieu ou le diable qu’il faudrait bien qu’on voit !...Oui mais une fois dans la maison du Didi quand le maire entend le boucan que ça faisait toujours,il fut moins courageux :il tâchait de se défiler en y envoyant les uns ou les autres d’abord….mais personne ne bougeait !...Il fut bien forcé d’y passer.En voyant qu’il ne pouvait pas faire autrement,il prit le devant et tout le monde suivit.
Pou monter chu le gueurné,c’étot ein vieux escayé en pierre que beillot dans la corre et que menot jeusque devant la quiau du plinché.Le maire aivot écairté le pus qu’al aivot pouvu son échairpe porqu’ille feusse pus lairge et qu’ille se voyeusse mieux,peu a trempé le grous bout de son écrasoû de treuffes dans l’eau b’nite,peu a qu’mencé de monter les mairches tot doucement.Les hommes qu’aivint d’oûté lous saibots suivint :nue ne fiot de breut,chaicun retenot moinme son vent,mas on entendot toquer le cœur dans l’estoumac de tot-ein-chaicun,chu tell’ment que l’émotionnement étot grand.Airrivés devant lai quiau,a se retornérent tortous pou vouâ chi ran ne barrot le chemi en por-derré :qui que sait quoué que ç’ot qu’ai’llot airriver ?...On vorsé de l’eaie b’nite chu le pas de lai porte,on fié de contre,des signes de crouée aivou ein bout de bouis,peu le maire en groûchissant sai voix le pus qu’a pouvé,queurié : « Au nom de lai loué,qui que ç’ot qu’ot lai ?... »Ran ne répondé qu’ein beurlan pus fort :on entendé ébouler des aiffaires,peu çai grondé en douguant dans lai porte.D’ein seul coup tot le monde se reviré et se mettai ai redesçoindre quate-ai-quate,mas portant a s’airrtèrent peu a remontèrent.
Pour monter sur le grenier,c’était un vieux escalier en pierre qui donnait dans la cour et qui menait jusque devant la porte du plancher.Le maire avait écarté le plus qu’il avait pu son écharpe pour qu’elle soit plus large et qu’elle se voit mieux,puis a trempé le gros bout de son morceau de pomme de terre dans l’eau bénite,puis il commence de monter les marches tout doucement.Les hommes qui avaient ôté leurs sabots suivaient :personne ne faisait de bruit,chacun retenait même son souffle,mais on entendait taper le cœur dans l’estomac de tout un chacun,tellement l’émotion était grande.Arriv és devant la porte,ils se retournèrent tous pour voir si rien ne barrait le chemin par derrière :Qui sait ce qui allait arriver ?...On verse de l’eau bénite sur le pas de la porte,on fait contre,des signes de croix avec un bout de buis,puis le maire en grandissant sa voix le plus qu’il peut,crie : « au nom de la loi,qui est là ?... »Rien ne répondit qu’un boucan plus fort :on entendit tomber des affaires,puis ça gronda en cognant dans la porte.D’un seul coup tout le monde se retourna et se mit à redescendre quatre à quatre,mais pourtant ils s’arrêtèrent et ils remontèrent.
Le maire qu’mandé encouère ein coup :au nom de lai loué,mas çai feut paireil,peut-ête bin pire !...A s’airmé don de couraige,peu carrément a viré lai quié,peu a redit encoué :au nom de lai loué….mas çai feut encoué paireil :tojors le moinme chantier !...En viant que ce qu’a y évot dans le gueurné n’ouvré pas lai quiau qu’étot portant débarrée,çai requinqué tot ai fait le maire que tenot bon lai pouégnie de lai porte : « Les aimis,qu’a dié en se revirant,récoutez vos bin :i vâs ouvri !.ai lai grâce de Dieu !... »Tos les mondes que tremblint fièrent viâ ein signe de crouée.D’eine main,le maire leuvent tot prot son écrâsou de treuffes,peu de l’aute a chouâche chu lai liquotte ,a pousse…lai quau s’ouvre,mas au moinme moment,ein beurdallement du Diabe se fait entende ein moinme temps qu’ein drôle de grondement,quéque chouse de grous et de bianc passe en coup de vent dans les queuches des hommes,peu vouéqui tot le monde,le maire en téte,Q por dessus téte,que beurdoulant en bas des escayers au mitan des forches,des dairds,des coutres,que ç’ot miraque qu’a n’y en eut point d’estreupiés…
Le maire demanda encore un coup :au nom de la loi,mais ce fut pareil,peut être bien pire !...Il s’arma donc de courage,puis carrément tourna la clé,puis redit encore :au nom de la loi…mais ce fut encore pareil :toujours le même chantier !...En voyant que ce qu’il y avait dans le grenier n’ouvrit pas la porte qui était pourtant débarrée,ça revigora tout à fait le maire qui tenait bon la poignée de la porte : « les amis qu’il dit en se retournant,écoutez bien :je vais ouvrir !.à la grâce de dieu !... »Tous les gens qui tremblaient firent vite un signe de croix.D’une main,le maire lève tout prêt son pilon à pommes de terre. ,puis de l’autre il appuie sur la poignée,il pousse…la porte s’ouvre,mais au même moment,un boucan du diable se fait entendre en même temps qu’un drôle de grondement,quelque chose de gros et de blanc passe en coup de vent dans les jambes des hommes, puis voici tout le monde,le maire en tête,cul par dessus tête,qui dégringole en bas des escaliers au milieu des fourches,des faux,des coutres,que c’était miracle qu’il n’y en eut pas d’handicapés…
Et quoué que voyant tos les hommes épinchés ai bas et les fonnes que joindint les mains,chu le pas de lai porte ?Ein groûs couéchon ,eine mére-treue que court viâ en virant de lai quoue vé l’ouâge laivous qu’on y beillot d’haibitude ai méger !...C’étot lai treue de chez le Didi qu’a lâchant tos les maitins pou lai fére ai’ller en champs,quétot montée chu le gueurné dans lai maitinée.Lai Cacane l’y aivot enfromée sans s’en méfier,aivant d’ai’ller lai messe et lai poor an-nimau y aivot paissé lai jornée.Raide aiffaudie,ille rebeuillot pairtout en foutant tot en l’air :ç’ot ce que fiot le breut qu’on entendot.Peu le temps-deurer de ses couéchenais que s’en môlot,l’empouâchot étou de deurer et lai fiot encoué enraiger.Ah vos pairlez d’eine reue qu’a fiot le maire et peu les hommes étou quanqu’a viérent de quoué qu’a retournot !Le maire qu’aivot beurdoulé jeusque dans lai corre,laivous qu’a s’étot foutu en panse de vaiche,s’étot raimassé,aissez tolé,et maragouégnant en râquiant son échairpe et son fond de culotte d’aiquand son couteais pou d’oûter lai borbe : « Cré nom de Feu,por ein tor de couéchon,çai,c’ot ein tor de couéchon !... »
Et quoi que voient tous les hommes éparpillés en bas et les femmes qui joignaient les mains,sur le pas de la porte ?Un gros cochon,une mère-truie qui court vite en tournant de la queue vers l’auge où on avait l’habitude de lui donner à manger !...C’était la truie de chez le Didi qu’on lâche tous les matins pour la faire aller aux champs,qu’était montée sur le grenier dans la matinée.La Cacane l’avait enfermée sans faire attention,avant d’aller à la messe et le pauvre animal y avait passé la journée. Très apeurée,elle fouillait partout en mettant tout en l’air :c’était ce qui faisait le bruit qu’on entendait.Puis l’ennui de ses cochonnets qui s’en mêlait,l’empêchait de durer et la faisait encore enrager.Ah vous parlez d’une tête que faisait le maire et puis les hommes aussi quand ils virent de quoi ça retournait !Le maire qu’avait roulé jusque dans la cour,là où il s’était mis en panse de vache,s’était ramassé,assez meurtri,et baragouignant en râclant son écharpe et son fond de culotte avec son couteau pour ôter la boue : « cré nom de feu,pour un tour de cochon,ça c’était un tour de cochon !... »
Mille mercis à Jean-Louis pour cette si amusante histoire de notre terroir Côte d'Orien (elle vient de Saulieu) , et à Sylviane pour ses si jolies cartes Morvandelles,dont je continue ci-dessous la publication..