Une réunion au sujet de l'assèchement des étangs des Marots a eu lieu salle Luc Schréder mercredi 30 mars 2022.
Mais avant cette réunion, une visite des sites des étangs avait eu lieu l'après-midi, avec une banderole qui résumait le sujet !
A la tribune se trouvaient les représentants de trois associations Châtillonnaises : la Société Archéologique et Historique du Châtillonnais (SAHC), la Société Mycologique du Châtillonnais (SMC) et l'Association des Riverains et Propriétaires d'Ouvrages Hydrauliques du Châtillonnais (ARPOHC).
Christian Jacquemin , président d'ARPOHC a évoqué la continuité écologique et la situation juridique des étangs des Marots.
Qu'est que la continuité écologique des cours d'eau ?
Il s'agit d'une obligation de rendre les ouvrages conformes à la continuité écologique des cours d'eau.
Une loi classe de nombreux cours d'eau en liste 1 et ou 2
-Les cours d'eau en liste 1 sont considérés comme en bon état écologique
-Les cours d'eau en liste 2 ont obligation d'aménagement ou d'effacement.
L'objectif national2013 était la destruction d'environ 20 000 ouvrages en 5 ans.
Une nouvelle loi de 2021 protège aujourd'hui de l'effacement les ouvrages hydrauliques en liste 2.
La situation juridique des étangs
Le ru du Val des Choux est classé en L1 et non en L2, il n'y a donc pas d'obligation de rétablissement de la continuité écologique par aménagement ou destruction.
L'ouvrage est fondé "en titre" car existant avant 1789, son statut ne peut être remis en cause.
Ce site est en forêt domaniale donc propriété de l'Etat, la gestion est confiée à l'Office National des Forêts.
Le Parc a entre ses mains l'avenir des étangs avec l'avis qu'il donnera.
Situé en cœur du Parc National, les travaux nécessaires sont soumis à autorisation du Directeur du parc National après avis du Conseil scientifique.
François Poillotte, Vice-Président de la SAHC, a retracé l'histoire des étangs vieux de huit siècles.
L'Histoire des étangs
Les étangs, un patrimoine historique remarquable.
Au XIIème siècle, des moines transformèrent le vallon forestier en y installant le prieuré du Val des Choux.
Les ducs de Bourgogne créèrent plusieurs étangs sur les 5 kms qui séparent le prieuré de la rivière « Ource ». Ces étangs peu profonds ont été créés, dans le but de fournir du poisson.
L'aménagement du ru du Val des Choux, dont l'adjudication des travaux avait eu lieu en 1811, a été entrepris mais non achevé en 1842. Cet aménagement avait pour objectif de permettre le flottage à bûches destiné à l'alimentation de Paris en bois de chauffage.
Ces aménagements ont été interrompus et n'ont finalement que peu servi du fait de l'arrivée sur le marché du charbon d'origine fossile, acheminé désormais par canaux et par chemin de fer au milieu du XIXè siècle.
Cet usage cessa donc, mais le ru et les étangs furent préservés, certains étangs ont d'ailleurs ensuite servi de pisciculture à partir de 1968.
La pisciculture a cessé en 1973, les étangs sont devenus des lieux de promenade et de pêche.
Ces sept étangs, disposés en chapelet, sont sans équivalent en France sur un si petit linéaire (5,5 km). Ils représentent en outre une réserve d'eau importante sur les plateaux calcaires, et sont donc bien sûr à préserver.
Catherine Jouanneteau, pour la SMC, a évoqué le patrimoine paysager des étangs des Marots, mais aussi leur patrimoine naturel , leur faune et leur flore.
Un patrimoine naturel
Des richesses liées à un patrimoine paysager remarquable et unique dans le Parc National.
On pouvait y voir, avant l'assèchement des étangs, différentes sortes de canards, des foulques macroules, des hérons cendrés, des aigrettes, des fuligules...
Et aussi plusieurs sortes de batraciens : crapauds, salamandres, tritons alpestres.
Mais aussi des moules perlières, des chabots , des lamproies et surtout l'écrevisse à pattes blanches qui est en voie de disparition, car supplantée par l'écrevisse américaine.
On y admirait le vol des odonates (libellules) dont les larves vivent au fond de l'eau (on les appelle des "traîne-bûches").
Des papillons très rares fréquentaient les étangs, comme ceux ci photographiés il y a quelques années par la famille Poillotte, le grand mars changeant et le papillon des frênes.
Sur les hauteurs, près des étangs, on trouve la ligulaire de Sibérie, et dans les marais de pente voisins une sorte rare de fougère des marais .
On y trouve aussi des orchidées des marais, des gentianes pneumonanthes, des choins, des fétuques.
Certains champignons disparaitront faute d'humidité nécessaire.
Pierre Potherat a présenté la synthèse des données hydrologiques locales et l'impact hydrogéologique probable de la suppression des étangs.
Conclusion
Le retour du ru du Val des Choux dans son lit initial après environ huit siècles, contribuera a fortement abaisser la nappe phréatique supérieure , à assécher les marais de pente associés, et probablement à favoriser son assec estival.
D'où une perte considérable de la biodiversité, ce qui va à l'encontre du but recherché.
Voici l'impact prévisible d'un effacement :
-Disparition d'une vitrine remarquable du Parc et d'une mémoire historique des siècles passés.
-Perte de richesses liées à un patrimoine naturel floristique et faunistique exceptionnel
-Perte de richesses liées à un patrimoine paysager remarquable, unique dans le Parc National des Forêts
-Disparition des réserves d'eau nécessaires à la faune, à la forêt, et pouvant pallier aux risques d'incendies
Ce que demandent les Associations , et les habitants du Châtillonnais
-La restauration des étangs dans leur état initial
-Une reconnaissance de l'intérêt patrimonial de ces étangs forestiers
Le Parc est en cours de construction et sa réussite est subordonnée à l'adhésion de ses habitants., il doit donc prendre en compte l'avis des habitants, aussi une pétition a été lancée.
Cette dernière, par internet et par le format papier a déjà rassemblé plusieurs milliers de signatures.
La parole a ensuite été donnée à des personnes travaillant à l'Office National des Forêts.
Monsieur Michon, Directeur qui n'a pas d'avis tranché.
Si ces étangs ont été mise en assec il y a quelques années, c'est parce que les digues étaient abimées, il y avait de nombreuses fuites.
Le coût des travaux à l'époque était évalué à 20 000 euros, somme difficile à réunir, mais peut-être possible....
Hélas, en 2019 on a évalué de nouveau le coût des travaux qui s'élève maintenant à ...150 000 €uros, rien que pour la digue du Marot inférieur !
Inutile de dire que l'ONF n'a pas cette somme....
Avec un accord du Parc National, on pourrait peut-être réunir une somme de 150 000 à 200 000 €uros.
Bertrand Barré, membre de l'ONF, mais aussi de NATURA 2 000 a ensuite pris la parole pour évoquer la température trop élevée des étangs quand ils étaient en eau.
On notait nous dit-il des hausses de températures de 5° entre l'amont et l'aval.
Ces hausses de températures ne sont pas propices aux écrevisses à pattes blanches, ni aux chabots et lamproies. Le ru leur est plus favorable car plus frais.
On comprend bien que Natura 2000 est pour l'asséchement !
Eric Tribouley , Responsable de l'Unité Territoriale de l'ONF a préconisé de réaliser un dossier ciblé, solide en accord avec l'ONF.
Il faut que le Parc National et l'ONF soient d'accord, sans quoi rien ne se fera.
Des questions ont été posées par plusieurs personnes présentes à la réunion.
Hubert Brigand, Conseiller Départemental et Maire de Châtillon sur Seine s'est dit consterné par l'asséchement des étangs qui va défigurer le paysage de la forêt domaniale.
Ce qui a été valable 800 ans ne le serait plus maintenant ?
Il faudrait agir vite, car plus le temps passe plus ce sera difficile de revenir en arrière. La question du financement ne serait pas pour lui un problème....
Il souhaite que le projet avance, mais qu'il va peut-être se heurter à un mur, alors courage pour la suite.
Philippe Vincent est Maire de Vanvey sur Ource et Président de Sequana. Cela fait 58 ans qu'il emprunte les routes qui longent les étangs des Marots et il souhaite qu'ils soient remis en eau.
Sequana ne peut rien faire pour le financement car l'Agence de l'Eau porte sur l'assainissement.
Jérémie Brigand, Président de la Communauté de Communes, a regretté aussi profondément l'asséchement des étangs et a salué le combat des associations contre l'Etat.
Le Conseil Scientifique du Parc National va se tenir prochainement.
Nous saurons alors si le combat va continuer...ou s'arrêter, je vous tiendrai bien sûr au courant.