Publié le 15 Octobre 2017
Une étude fort intéressante faite par les élèves du lycée Désiré Nisard, mise en page par Dominique Masson.
Merci à lui pour cet envoi, et bravo aux lycéens !
STUTTGART, DE L’EPOQUE DU NAZISME
A LA RECONCILIATION FRANCO-ALLEMANDE
Du au 30 septembre 2017, 17 élèves du lycée Désiré Nisard de Châtillon-sur-Seine, accompagnés de leurs professeurs, madame Bongard et monsieur Chiasson, ont participé à un échange avec le lycée Hölderlin de Stuttgart afin d’étudier l’Allemagne de 1939 à 1945 et l’évolution ultérieures entre la France et l’Allemagne.
L’Allemagne entre 1939 et 1945, c’est d’abord l’Allemagne nazie, le conseil municipal de la ville de Stuttgart étant composé uniquement de chemises brunes, selon la photographie exposée à la Maison de l’Histoire (« Haus der Geschiste ».)
(Archives fédérales allemandes : antenne de Ludwigsburg pour les crimes nazis)
Les élèves purent, après le visionnage d’un film de témoignages des rescapés d’Oradour, travailler, à la section des archives de la République allemande consacrée à la recherche des criminels nazis installée à Ludwigsburg, sur le problème des responsabilités des soldats et des officiers dans la division « das Reich », à Tulle ou à Oradour ; chaque groupe d’élèves, après étude de documents, devait prendre position et expliquer ses décisions
(Monsieur Kress, chargé de l'animation aux Archives)
Travail des élèves aux Archives :
(Les élèves français en pleine recherche)
L’une des grandes actions du régime nazi fut l’extermination des juifs. A Stuttgart, l’expulsion des juifs commença à partir de 1939. A partir de 1941, tous les citoyens juifs du Württemberg furent parqués dans le parc d’exposition du Killesberg, puis déportés par la gare du Nord vers l’Est, où la plupart périrent.
(Photographie exposée à la gare du Nord, montrant l'enlèvement des valises des juifs)
(A la gare du Nord, une partie du mur sur lequel sont inscrits tous les noms des personnes juives déportées)
A Esslingen, ville au sud-est de Stuttgart, existait un quartier juif. La rue des Juifs fut débaptisée par les nazis en 1937 mais la synagogue, en bois et proche d’autres maisons, ne fut pas brulée lors de la Nuit de Cristal en novembre 1938. Cependant les juifs en furent chassés et le bâtiment abrita la Jeunesse hitlérienne.
(Plaque commémorative apposée sur le mur de l'ancienne synagogue à Esslingen)
(L'ancienne rue des Juifs à Esslingen)
(L'ancienne synagogue à Esslingen)
Plusieurs « Stolpersteine », ou « pierres à trébucher », posées dans le trottoir devant les maisons, sont les seuls souvenirs des habitants déportés (juifs, opposants à Hitler, malades mentaux, tsiganes, etc.) et qui ne sont jamais revenus.
Des exemples de Stolpersteine à Esslingen :
(Les élèves devant les Stolpersteine )
Face à Hitler, certains civils ou militaires cherchèrent à résister.
Kurt Gerstein, né en 1905, militant chrétien anti-nazi avant 1939, devint ingénieur des mines et médecin. Mais, ayant reçu en 1941 l’urne funéraire d’une parente morte en clinique psychiatrique, il pensa aussitôt qu’elle avait été euthanasiée et décida de comprendre ce qui s’était passé en s’engageant dans la SS. Bien que chargé de la confection d’« acide prussique », il continua ses activités anti-nazies et chercha à avertir, en vain, le consulat de Suède, le Vatican et les Britanniques. S’étant suicidé en 1945, sa mémoire a été réhabilitée en 1965.
(Travaux d'élèves aux archives de Ludwigsburg)
Un autre résistant à Hitler fut le comte von Stauffenberg. Officier de la Wehrmacht, il fut l’une des figures centrales de la résistance militaire au nazisme. Au début, il avait montré sa sympathie pour différents aspects du national-socialisme comme le nationalisme ou le révisionnisme concernant le traité de Versailles, jusqu’à ce que le caractère criminel du régime le pousse dès 1941 à la résistance. Il participe alors à un complot contre Adolph Hitler, organisant personnellement l’attentat du 20 juillet 1944, coup d’Etat militaire avorté, connu aussi sous le nom d’« opération Walkyrie ».Il sera fusillé le lendemain. Un musée, sous le Vieux Château, lui est consacré.
En 1944, la ville de Stuttgart fut largement bombardée par des raids aériens alliés à cause de ses nombreuses usines ; par exemple, dans la nuit du 20 au 21 février 1944, 598 bombardiers et 12 marqueurs pilonnèrent les installations aéronautiques de Stuttgart.
Après le 8 mai 1945, Stuttgart fut sous occupation française puis américaine.
(Combattants du corps franc Pomiès (49ème régiment français d'Infanterie) dans les ruines de Stuttgart)
(le nouveau château après les bombardements)
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(L'église évangélique après les bombardements)
(Aujourd'hui le nouveau château)
(La place Schiller, au chevet de l'église évangélique)
Vint ensuite le temps de la reconstruction matérielle, mais aussi le temps pour l’Allemagne de regarder son passé récent, tout en regardant vers l’avenir en cherchant à se réconcilier avec le reste de l’Europe.
(L'Association Lernort Geschichte)
Concernant les juifs, la ville de Stuttgart a pris lentement en compte le génocide juif. En 1962 fut érigée une stèle au Killesberg concernant la déportation juive, mais évitant de parler de génocide. Un monument placé en 2013 rappelle l’histoire du lieu en évoquant son utilisation pendant le nazisme. L’association « Lernort Geschichte », composée de membres bénévoles, souvent jeunes, patronnée par la ville de Stuttgart, met en œuvre un programme afin d’établir un lien entre passé, présent et avenir, de façon à ce que les jeunes connaissent l’histoire et soient formés à la démocratie active.
(Les élèves français devant la stèle commémorative au Killesberg)
(Stèle retraçant l'historique du Killesberg)
C’est également vers les jeunes que le général de Gaulle, alors président de la République française, va se tourner lors de son voyage en Allemagne en 1962. Elèves français et allemands ont travaillé en groupes, aux archives municipales de Stuttgart, sur le retentissement du voyage du général de Gaulle en Allemagne et particulièrement à Stuttgart. Dès 1958, le président de Gaulle et le chancelier Adenauer s’étaient rencontrés à Colombey-les-deux-Eglises. Du 2 au 8 juillet 1962, le chancelier Adenauer fit une visite officielle en France. Et, quelques semaines plus tard, du 4 au 9 septembre 1962, le général fit un voyage en Allemagne. Le 9 septembre, à Ludwigsburg, il est accueilli par le président de la République fédérale Heinrich Lübke et le ministre président du Bade-Wurtemberg Kurt Kiesinger. Devant une assemblée de jeunes allemands, le général de Gaulle fit un discours en allemand :
« Je vous félicite d’être de jeunes allemands, c’est-à-dire les enfants d’un grand peuple. Oui, d’un grand peuple. D’un grand peuple qui, parfois au cours de son histoire, a commis de grandes fautes et causé de grands malheurs, condamnables et condamnés. Mais un peuple qui, d’autre part, répandit de par le monde des vagues fécondes de pensée, de sciences, d’art, de philosophie, enrichit l’univers des produits innombrables de son invention, de sa technique et de son travail, déploya dans les œuvres de la paix et dans les épreuves de la guerre, des trésors de courage, de discipline et d’organisation. Solidarité, désormais, toute naturelle, il nous faut, certes l’organiser, C’est la tâche des gouvernements. Mais il nous faut aussi la faire vivre, et ce doit être, avant tout, l’œuvre de la jeunesse… ».Dès la fin du discours, 500 000 personnes envahirent les rues de Ludwigsburg pour tenter d’apercevoir le général.
(Elèves français et allemands aux archives municipales de Stuttgart)
Ce début d’entente avait déjà été préparé par le jumelage entre la ville de Stuttgart et celle de Strasbourg en mai, officialisant la réconciliation de celle-ci avec l’Allemagne, et fut complété, le 24 octobre 1962, par un match amical de football entre la France et l’équipe de Stuttgart, le précédent match ayant eu lieu en 1937 (match nul, 2à2). L’année suivante fut signé le traité de l’Elysée.
(Elèves français et allemands au lycée Hölderlin)
(Texte et photos Dominique Masson)