Dieux de Pitié châtillonnais...et d'ailleurs
Jenry Camus collectionne les photos de Jeanne d'Arc... mais aussi les statues des Dieux de Pitié du Châtillonnais, et d'ailleurs. Au cours de mes promenades j'en ai, moi aussi, photographié quelques unes .
Nous en avons parlé, et avons décidé de nous les transmettre. Je lui ai donné les miennes, il m'a donné les siennes.
En prime, il m'a offert un article qu'il avait écrit sur le sujet pour le journal local, le Châtillonnais. Merci à lui !
Voici son article, il sera illustré de nos photos respectives (photos de Jenry : JC, mes photos : CT).
LES DIEUX DE PITIÉ
On les connaît mal. Ils sont discrets, on ne parle pas beaucoup d'eux. Ils ont l'air si tristes ! Est-ce en raison de l'usure du temps ou du peu de regard qu'ils suscitent. Il est vrai qu'ils n'ont pas connu les Celtes, les Romains ou les Templiers. Ils ne datent que du XVIe siècle. Et pourtant les Christs de pitié sont un des fleurons du patrimoine historique du Châtillonnais.
Ils sont là, assis sur un rocher, dépouillés de leurs vêtements, les reins drapés dans un périzonium, les mains attachées, une couronne d'épine sur la tête. Leurs visages marqués par la souffrance expriment la résignation. Qui sont ces Christs de pitié, appelés également Christs aux liens ou Ecce Homo ? Une représentation de Jésus attendant son supplice qui peut paraître bien modeste à coté des mises au tombeau, des piétas ou des calvaires. Ces statues, pour la plupart en pierre, sont toutes dues aux ciseaux de sculpteurs anonymes, artistes habiles ou honnêtes artisans, qui ont ainsi créé un art religieux populaire qui s'est répandu aux XVIe et XVIIe siècles dans l'Est de la France et en Normandie.
Notre Châtillonnais peut s'honorer de posséder quatorze Christs de pitié.
L'un d'eux accueille les visiteurs du musée châtillonnais, un roseau à la main, une tête de mort à ses pieds. Pratiquement nu, il a les mains et les pieds (une représentation assez rare) attachés :
(Photo JC)
Un autre Christ, datant du XVe siècle et provenant de l'abbaye du Val des Choux, est en chêne et la restauration en a fait ressortir la polychromie. Les mains attachées, une corde autour du cou, il est assis, une cape sur les épaules.
(photo CT)
Un autre Christ en bois se trouve dans l'église de Leuglay. Lui aussi a été restauré.De tous les Christs de pitié du Châtillonnais, c'est le seul qui est debout. Enveloppé dans une cape rouge, il marche vers son supplice :
(Photo CT)
Christs de pitié, vous portez bien votre nom, vous qui, bravant les intempéries, si peu protégés dans une niche, êtes là depuis si longtemps regardant de rares passants. Et votre pierre calcaire a souffert de l'érosion et de certaines gens. A Grange Didier, le Christ est amputé de ses quatre membres et son visage est mutilé.
A Aisey-sur-Seine, il a perdu un bras et une main.
(Photo CT)
A Poiseul-la-Ville :
(Photo CT)
A Hierce :
(Photo CT)
A Baigneux-les-Juifs (celui-ci daté de 1760):
(Photo CT)
Malgré quelques mutilations, ils ont mieux résisté au temps et montrent leurs visages douloureux dans une attente majestueuse et tragique. Un autre Christ de pitié, celui du Val de Seine à Baigneux a été volé en 1979.
D'autres Christs, à l'abri dans une église, ne voient pourtant que les fidèles de rares offices. Nos églises étant la plupart du temps fermées, ce n'est qu'à la faveur d'une messe ou en réclamant la clef du paradis que l'on peut admirer les autres Christs de pitié du Châtillonnais.
A Saint-Jean de Châtillon, le Christ est assis sur un rocher portant les symboles des quatre évangélistes:
(Photo CT)
A Poiseul la Ville :
(Photo CT)
A Mauvilly, les mains sont liées par une corde qui sinue de manière décorative sur le rocher.
A Quemigny, le Christ, assis sur un manteau, montre un visage à la tristesse poignante :
(Photo CT)
A Laignes, l'Ecce Homo est marqué du sang de la flagellation:
(Photo JC)
Le Christ le plus étonnant est celui de Coulmier-le-Sec, très grand (1 mètre 71), très maigre et donnant l'impression de se lever pour vous accompagner dans votre visite de l'église :
(Photo JC)
Deux autres Christs, plus modestes, se trouvent dans des propriétés privées à Vanvey et à Ampilly-le-Sec.
Aux Hospices de Beaune:
(Photo JC)
A Semur en Auxois :
(Photo CT)
A Salives :
(Photo JC)
A Saint Seine sur Vingeanne :
(Photo JC)
A Flavigny sur Ozerain on en trouve deux :
(Photo JC)
(Photo JC)
à Mussy :
(Photo CT)
Dans les cathédrales de Troyes, Chaumont, Reims, Rouen, j'ai croisé le regard douloureux du Christ de pitié. Et je n'étais pas le seul, des fidèles, des touristes, des passants... Puisse-t-il en être de même dans notre Châtillonnais !
Jenry Camus