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Paul Regnard, né à Châtillon sur Seine, fut un physiologiste, océanographe et médecin-chercheur de renommée mondiale....
J'ai reçu il y a quelque temps, le mail d'une lectrice qui me demandait si je voulais bien me rendre au cimetière Saint-Vorles pour rechercher la tombe de son trisaïeul, Antoine Regnard.
Hélas je ne l'ai pas retrouvée, ni trouvé de trace dans le registre de la Mairie, cette tombe avait dû être relevée.
Pourquoi cette recherche ? eh bien parce que cette dame avait retrouvé par hasard les archives familiales de son arrière-grand-père Paul Marie Léon Regnard, né à Châtillon sur Seine en 1850, et qu'elle aurait aimé une photo de la tombe du père de ce dernier pour l'ajouter à son dossier de souvenirs familiaux.
Et son arrière-grand-père, Paul Marie Léon Regnard, ce n'est pas n'importe qui !
Elle m'a offert beaucoup de documents qui m'ont appris qu'il fut vraiment une personnalité hors du commun par ses recherches médicales.
J'ai donc pensé faire connaître Paul Regnard, à titre posthume, aux habitants de sa ville de naissance, il le mérite bien !
Paul Marie Léon Regnard fut un physiologiste, océanographe et médecin français.
Il naquit à Châtillon sur Seine le 7 novembre 1850 , fils d’Antoine Regnard et d’Euphrasie Olivier.
Son père était avocat, docteur en droit et juge suppléant au tribunal de Châtillon sur Seine. (c'est lui dont j'ai cherché vainement la tombe)
Son grand-père était maître de forges à Chevrolet, entre La Chaume et Boudreville, forges de l’abbaye de Longuay
Pendant son enfance , il aimait beaucoup aller, disait-il, dans ce ravissant pays qu’il appelait « Chevroley ».
Paul fréquenta le Collège de Châtillon sur Seine, mais , hélas, son père mourut lorsqu’il avait 8 ans, et sa mère et lui partirent pour Paris.
Voici ce qu'il dit de ce changement de vie radical :
Ma mère très occupée de mon éducation faisait venir un professeur du Collège tous les soirs et je vois encore son nez plein de tabac qui coulait lamentablement, qui sentait mauvais et qui me dégoutait d'autant qu'il avait la manie de me passer la main sur la figure.
Mais je devais en être débarrassé bien vite car dans les premiers jours de l'année suivante ma mère décida que nous viendrions à Paris.
Elle ne connaissait presque personne à Châtillon où elle était venue en étrangère.Il est vrai qu'elle ne connaissait non plus personne a Paris mais, au moins, là, elle trouverait le moyen de me faire élever convenablement dans un lycée ou dans un collège de façon à me donner une éducation supérieure.
Elle s'exilait car elle faisait difficilement des connaissances et le fait est que,que, jusqu'à sa mort, elle n'en a pour ainsi dire pas eues.
Nous avons vécu tout seuls à Paris ,sans fortune mais très courageux et n'ayant pas besoin de grand chose.
En arrivant à Paris (en septembre 1859) ma mère loua, place de l'Odéon, un petit appartement très éclairé, qui était dans une vieille maison qui datait de 1193 et avait été bâtie pour le duc d'Orléans, lequel avait fait des spéculations de maisons pour placer son argent.
Toute la place de l'Odéon lui appartenait et vous savez sans doute que sa spéculation s'était étendue en grand et qu'il avait fait construire ce qu'on appelle le Palais-Royal .
C'était vieux mais confortable; il n’y avait qu’un défaut, c’est que les chambres se commandaient et qu’il fallait passer par la cuisine pour aller au salon ; mais au 19ème siècle c'était sans importance.
Sa mère l'inscrivit au prestigieux Collège Stanislas où il devint ami avec un certain Albert, Prince de Monaco (le futur Albert Premier de Monaco arrière grand-père de l'actuel prince de Monaco Albert II).
Il devint interne des Hôpitaux en 1874 et soutint sa thèse de Doctorat en 1878, mais c’est surtout de biologie dont il s’occupa toute sa vie.
Préparateur de physiologie à la Faculté de Médecine de Paris, puis préparateur de Paul Bert à l’école des Hautes Etudes, il fit avec son maître des recherches remarquables sur l’eau oxygénée et son action sur les organismes et aussi sur l’anesthésie au protoxyde d’azote sous pression.
(Paul Bert)
Sous sa direction furent construites des cloches qu’utilisèrent différents chirurgiens pour anesthésier leurs patients.
Paul Regnard devint par la suite sous-directeur du laboratoire des Hautes Etudes et dès 1878 il fut chargé d’enseigner la physiologie générale à l’Institut National agronomique qui venait d’être fondé.
De ce moment, datent ses travaux sur la physiologie respiratoire, le dosage de l’oxyde de carbone, les variations pathologiques des combustions dans la respiration.
Resté depuis ses études, au collège Stanislas, un ami d’Albert de Monaco, il fut un des collaborateurs du prince lorsque ce dernier commença ses campagnes scientifiques sur les océans, il devint alors un des premiers pionniers de l’Océanographie qui était alors une science tout à fait nouvelle.
En 1897, il accompagna le Prince Albert sur le yacht du Prince, "Princesse Alice II", en direction du Grand Nord.
https://www.passionriviera.com/les-navires-dexploration-du-prince-de-monaco/
(Le Prince Albert Ier de Monaco)
Paul Regnard inventa de très ingénieux appareils pour la capture et l’étude des poissons et des autres animaux des grandes profondeurs.
Cet imposant palais achevé après 11 ans de construction, est l'Institut Océanographiaue de Monaco.
Il comporte les premiers bassins en ciment armé (conçus dès 1903). Il fut inauguré officiellement le 29 mars1910 et dirigé par le Prince Albert 1er.
Dix mois après celui de Monaco, un second Musée Océanographique monégasque fut inauguré à Paris, le 23 janvier 1911 par le prince Albert Ie,
Le siège de l’Institut y fut officiellement inauguré et sa direction confiée au Docteur Paul Regnard.
Paul Regnard y jouira d’un appartement absolument princier.
Paul Regnard fut aussi membre de l’Académie de médecine depuis 1895, dans la section des Sciences Biologiques.
Il fut promu Chevalier de la Légion d’Honneur en 1884, puis Officier en 1900
Son œuvre écrite reflète les différentes disciplines qu’il revendiqua.
« L’iconographie photographique de la Salpétrière » alors dirigée par Charcot et un volume sur les « Maladies épidémiques de l’esprit .
Paul Regnard dirigea avec Désiré Magloire Bourneville le service photographique de la Salpêtrière (service créé par Charcot), il étudia notamment l'hystérie.
(Jean-Martin Charcot)
Voici un très beau texte de Paul Regnard sur les sorcières :
Il a publié en outre un ouvrage important sur « La vie dans les eaux » où il étudia surtout la physiologie des habitants de la mer, et également un livre sur « la cure d’altitude »
Il épousa Thérèse Chazal le 25 juillet 1881, ses témoins furent Paul Bert, député et professeur à la Faculté des Sciences et Jean-Martin Charcot, professeur à la Faculté de Médecine.
Il eut un fils, Michel, qui lui-même eut deux fils, Jean et Jacques. Jean étant le père de la lectrice qui m'a donné les documents sur son arrière-grand-père.
Paul Regnard et son fils Michel :
Paul Regnard s’éteignit à Paris en 1927, il fut inhumé au cimetière Montparnasse dans la tombe Chazal, auprès de son épouse Thérèse Chazal.
Cette sépulture accueillit également son fils Michel et ses petits fils.
Si vous vous rendez un jour près du cercle polaire, vous pourrez aller admirer le Regnardneset.
Le Regnardneset, en français "Cap Regnard" se trouve au Spitzberg, en Norvège.
Ce nom lui fut donné en l’honneur de Paul Regnard (1850-1927) physiologiste français qui participa aux expéditions polaires de son ami Albert Premier de Monaco.
Le peintre Louis Tinayre qui accompagnait le Prince Albert dans ses expéditions, représenta le cap Regnard dans un superbe tableau que l'arrière- petite-fille de Paul Regnard possède encore, tableau qui serait digne de retourner dans un musée après restauration.
Paul Regnard fut un chercheur infatigable , voici un PDF qui nous permet de suivre ses recherches sur la respiration, l'urée , l'eau oxygénée et bien d'autres thèmes extrêmement intéressants même si l'on ne fait pas partie du monde médical :
« Travaux scientifiques du Dr Paul Regnard »
En lisant ce texte passionnant, illustré de machines conçues par lui-même, j'ai vu que Paul Regnard avait demandé à Louis Cailletet le prêt d'une de ses machines (peut-être construite dans le laboratoire de Châtillon ou dans celui de Chênecières à Saint-Marc, qui sait ?)
A-t-il su que Louis Cailletet et lui étaient nés dans une petite ville bourguignonne appelée Châtillon sur Seine ???
Cela restera un mystère, en tout cas la ville de Châtillon sur Seine peut être fière d'avoir été le lieu de naissance de ces deux immenses savants que furent Paul Regnard et Louis Cailletet.
Liste des ouvrages de Paul Regnard
- Dosage de l'urée, appliqué aux recherches chimiques, Paris, Guillaume , 1874
- Dosage de l'urée, appliqué aux recherches chimiques. Procédé de M. Regnard. Construit par Alvergniat frères, Paris, 10, rue de la Sorbonne, 1877.
- Recherches expérimentales sur les variations pathologiques des combustions respiratoires, [thèse pour le doctorat en médecine présentée le 16 décembre 1878], Versailles, Impr. et stér. Cerf et fils , 1878.
- Recherches expérimentales sur les variations pathologiques des combustions respiratoires, Publications du Progrès médical, Paris, V.-A. Delahaye , 1879
- De l'Influence des radiations rouges sur la végétation, [Extrait des Annales de l'Institut national agronomique, no 3, 1878-79], Paris, J. Tremblay, 1880.
- Sorcellerie, magnétisme, morphinisme, délire des grandeurs, Paris, E. Plon, Nourrit et Cie , 1887
- Physique biologique. Recherches expérimentales sur les conditions physiques de la vie dans les eaux, Paris, G. Masson , 1891.
- La Cure d'altitude, Paris Masson , 1897.
- Institut national agronomique. Programme du travail de vacances. [Note République française. Ministère de l'Agriculture], Argenteuil : impr. de Worms-Ollivier, 1904.
- « Sur un dispositif destiné à éclairer les eaux profondes », in Sur l'Emploi de nasses pour des recherches zoologiques en eaux profondes, par le prince Albert de Monaco. (9 juillet 1888), Paris, Gauthier-Villars , (s. d.).
En association
- avec Désiré-Magloire Bourneville
- De l'ischurie hystérique, Paris, aux bureaux du "Progrès médical", A. Delahaye et Cie , 1876
- Iconographie photographique de la Salpêtrière (service de M. Charcot), Paris, aux bureaux du "Progrès médical" , 1875-1880:
- avec Félix Jolyet (1841-1922),Recherches sur la respiration des animaux aquatiques, Paris, Masson , 1877.
- avec Paul Loye (1861-1890), Expériences sur un supplicié, Paris, impr. de V. Goupy et Jourdan, 1885.
- avec Henri Johnson, (artiste peintre),Légendes explicatives des planches murales d'anatomie et de physiologie, Paris, C. Delagrave , 1886
- avec Georges Eugène Wery (1861-1936), Eugène Risler, [Extrait des "Annales de l'Institut national agronomique", 2e série, t. 4, fasc. 2], Paris, J.-B. Baillière et fils, Librairie agricole de la Maison rustique , 1905.
- avec Paul Portier (1866-1962), Hygiène de la ferme, Paris, J.-B. Baillière et fils , 1906.
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Commentaires
Merci pour cet article très intéressant.